Les raisons d’une vente de cabinet sont nombreuses : déménagement, départ à la retraite, reconversion professionnelle… Quelle que soit la raison de votre choix de céder votre clientèle, patientèle ou vos murs, il faut savoir un certain nombre de choses avant de vous lancer dans cette démarche qui n’est pas anodine. Heureusement, Indy (ex Georges) est là pour vous dire tout ce que vous avez à savoir pour céder ce qui a été pendant quelques années (ou quelques décennies) le cœur de votre activité professionnelle !
Cet article a été initialement diffusé sur le groupe Facebook Compta Pour Les Professions Libérales, réseau d'entraide des praticiens libéraux dans leur comptabilité.

Cession totale ou partielle ?
Avant toute chose, un peu de vocabulaire. Pourquoi parler de cession plutôt que de vente ? La cession est un terme préféré à celui de vente pour toute vente comportant des éléments incorporels. C’est pour cela que l’on préfère parler de vente d’immeuble, mais que l’on trouve de la même manière l’expression « cession de fonds de commerce » pour une entreprise transmettant sa clientèle.
Expliquons maintenant ces autres termes qui peuvent sembler flous pour certains : la cession totale ou partielle. Une cession totale signifie que l’ensemble des éléments corporels et incorporels du cabinet sera cédé au repreneur.
En revanche dans la cession partielle, seule une partie de ces éléments sera vendue à ce dernier. Elle concerne généralement une partie de patientèle. Il faudra mentionner dans le contrat de cession le pourcentage de la clientèle cédée.
Dans un cas comme dans l’autre, il convient de s’assurer que les termes de la vente ne rentrent pas en contradiction avec d’éventuelles conventions ou contrats que le professionnel libéral aurait pu lier avec d’autres collègues. En revanche s’il exerçait seul et cède partiellement son cabinet, un contrat d’exercice en commun devra être conclu.
Les éléments de l’acte de vente
Jusqu’à l’été dernier, les actes de ventes d’un fonds de commerce avaient des mentions obligatoires. La loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 (article 1er) de simplification, de clarification et d’actualisation du droit des sociétés a supprimé ces dernières dans l’acte de vente d’un fonds de commerce. Mais que comprend un acte de vente de fonds libéral aujourd’hui ? Vous y trouverez notamment :
- La description du fonds cédé (éléments incorporels et/ou corporels dont droit au bail pour une cession totale)
- Les charges et conditions générales (dans le cas d’une entreprise individuelle, les dettes restent à la charge du cédant)
- Les modalités de la reprise (reprise de certains engagements, clause de non concurrence, accompagnement du successeur par le cédant…)
- Le prix de vente
- Les modalités de paiement
- Une présentation de la clientèle ou de la patientèle du cédant à l’acquéreur (le cédant devra par ailleurs prévenir ses patients/clients du changement et les inciter à poursuivre leurs soins ou relation avec ce dernier)
- Les éventuelles conditions suspensives à la réalisation desquelles la cession est subordonnée
- D’autres clauses particulières au fonds libéral en question
Comment évaluer ma clientèle / patientèle ?
Si l’évaluation des biens corporels se fait relativement aisément, le cas des biens incorporels est bien plus complexe à prendre en main. Il est d’usage de faire une moyenne du chiffre d’affaires brut réalisé pendant les 3 dernières années, le prix de vente étant généralement de 25 à 75%* de la moyenne ainsi calculée. Ce chiffre dépend de votre profession et de la désirabilité de l’emplacement que le cabinet occupe. Un cabinet en centre-ville sera par exemple plus demandé qu’un cabinet rural.
*Exemples :
- Médecins : entre 25 et 50% de la moyenne des honoraires sur les trois dernières années
- Kinésithérapie : Entre 50 et 75% du bénéfice moyen sur les trois dernières années
- Infirmerie libérale : Entre 30 et 50% de la moyenne des honoraires sur les trois dernières années.
Le site de bpifrance propose trois autres moyens d’évaluer sa patientèle que voici résumés en quelques phrases :
La valeur patrimoniale
Cette méthode d’évaluation se base sur le prix des actifs valorisant les actifs immobilisés en s’appuyant sur les prix du marché. C’est souvent à partir du chiffre d’affaires qu’ils sont valorisés en pourcentage de ce dernier. Pour les fonds libéraux, la valeur patrimoniale est égale à la valeur des actifs réévalués au prix de marché. Cependant, cette technique peut-être difficilement applicable puisque ces informations ne sont pas rendues publiques, à part certaines données récoltées par des organismes privés tels que interfimo (mais dans ce cas particulier, ces dernières ne concernant que les projets financés, elles peuvent être biaisées ou incomplètes). De plus, elle ne prend pas en compte les coûts que peut avoir le cabinet, qui peut grandement varier d’un praticien à l’autre.
La valeur de rendement
Cette méthode consiste à capitaliser les bénéfices réalisés. Un coefficient généralement compris entre 3 et 7 est appliqué aux bénéfices réalisés sur les trois derniers exercices, qui dépend des points forts et des points faibles ressortis du diagnostic de l’entreprise. La structure des charges doit être appréciée afin de s’assurer qu’elle est bien en adéquation avec les bonnes pratiques du secteur d’activité concerné ainsi qu’avec les normes en vigueur dans le métier. Cette méthode a cependant le même inconvénient que la valeur patrimoniale en ce qui concerne la pertinence et l’actualisation du coefficient. De plus, le bénéfice n’est pas toujours représentatif de par sa nature même : certains frais généraux sont indépendants des besoins liés à l’exploitation du cabinet. Par ailleurs, les investissements futurs et le besoin en fonds de roulement ne sont pas pris en compte.
La valeur du banquier
C’est l’évaluation de la capacité du repreneur à rembourser son emprunt tout en s’assurant un revenu au moins équivalent à celui qu’il aurait pu toucher en tant que salarié. Le calcul doit comprendre la charge de remboursement d’un emprunt qui couvre 100% de la valeur du cabinet libéral, la charge fiscale liée au fait que seuls les intérêts d’un crédit corporel sont déductibles et la charge annuelle du financement des équipements et aménagements.
Dans tous les cas, vous devrez faire particulièrement attention à ces 5 points pour effectuer votre diagnostic :
- La qualité de la clientèle : en évaluant par exemple son ancienneté, sa localisation, l’intensité concurrentielle, les délais de paiement des clients… Sachez par ailleurs que l’on prévoit entre 10 et 20% de perte de chiffre d’affaires suite à un changement de praticien.
- La qualité du personnel : en prenant en compte leur niveau de qualification et de formation et la qualité des relations qu’ils ont avec la clientèle. Les clauses de leurs contrats de travail devront également être assimilées.
- La qualité des équipements et aménagements : à partir notamment de la valeur nette comptable des immobilisations
- La qualité de l’organisation : à travers le suivi des missions, le niveau d’informatisation du cabinet ou les archives créées par le professionnel
- La qualité de l’environnement juridique : en analysant tous les contrats souscrits par l’entreprise et les bulletins de salaire
Attention : l’achat ne porte pas sur la patientèle/clientèle en elle-même, mais sur un « droit de présentation » de la part du cédant en faveur de l’acquéreur. Les patients/clients restent libres du choix de leur prestataire.
Conséquences fiscales
L’acquéreur d’un fonds libéral ou d’une clientèle / patientèle est redevable de droits d’enregistrement. Ils répondent aux taux d’imposition suivants :
- 0% pour un prix de cession de 23 000 € ou moins
- 3% entre 23 000 et 200 000 €
- 5% pour plus de 200 000 €
Ces frais sont cependant déductibles de votre base imposable. Notez que si la transmission s’opère dans une même famille ou à un salarié, la cession est exonérée tant qu’elle est inférieure à 300 000 €.
NB 1 : pour un achat de clientèle/patientèle en Zone de Revitalisation Rurale (ZRR) ou Zone Franche Urbaine (ZFU), ces droits sont abaissés à 1% entre 23 000 € et 107 000 €.
NB 2 : Vous devez immobiliser votre patientèle/clientèle, mais vous ne pouvez pas l’amortir (cf notre article sur le sujet)
De son côté, le cédant est imposé sur la plus-value professionnelle. Cette dernière est calculée par la différence entre le coût d’acquisition éventuel de la clientèle/patientèle et le prix de cession. Elle est imposée au taux de 30% environ (impôts et charges sociales compris).
Il existe cependant des moyens de voir exonérée cette plus-value, à la condition commune à toutes ces propositions que vous exerciez avec votre clientèle depuis au moins cinq ans :
- La moyenne de vos recettes annuelles ne dépasse pas 90 000 € : exonération totale
- Exonération partielle si vous dépassez le seuil de 90 000 € et jusqu’à 126 000 € d’honoraires annuels
- Départ à la retraite dans les deux ans suivant la cession : exonération des impôts, les prélèvement sociaux restent dus au taux de 17,20%
- Le prix de cession est inférieur à 300 000 € : exonération totale
- Il est compris entre 300 000 et 500 000 € : exonération partielle
Encore une question ? Ne cédez pas à l’hésitation de la poser en commentaire ou via le live-chat d’Indy (ex Georges) ! Et n’hésitez pas à rejoindre notre communauté d’indépendants sur notre groupe facebook de comptabilité 😉
