Les intérêts liés aux emprunts ou placements ne sont pas toujours payés immédiatement. Certains s’accumulent au fil du temps sans être encore réglés : ce sont les intérêts courus non échus (ICNE). Ces derniers sont essentiels pour les entreprises : ils garantissent des comptes justes et une vision claire des résultats financiers, en reflétant la réalité économique avant tout mouvement d’argent. Mais comment distinguer les ICNE des autres formes d’intérêts ? Quelle est la bonne méthode pour les comptabiliser et les suivre dans le compte de résultat ? Enfin, quels impacts peuvent-ils avoir sur la situation financière et fiscale de l’entreprise ? Découvrez tout ce qu’il faut savoir dans cet article.

Résumé :
- Les ICNE assurent une image fidèle des comptes en rattachant les charges ou produits financiers à l’exercice concerné, conformément aux principes comptables.
- Leur calcul repose sur une méthode précise incluant le montant, le taux d’intérêt et la période écoulée, avec un impact direct sur le résultat comptable et fiscal.
- La comptabilisation varie selon le rôle de l’entreprise : en charge à payer pour l’emprunteur, en produit à recevoir pour le prêteur.
- Des erreurs fréquentes peuvent fausser les comptes : oublis de clôture, mauvaise contre-passation ou typage incorrect des écritures.
Qu’est-ce que les intérêts courus non échus (ICNE) ?
Définition
Les intérêts courus non échus (ICNE) désignent les intérêts générés par une dette ou une créance qui s’accumulent au fil du temps, mais dont la date de paiement ou d’encaissement n’est pas encore arrivée à échéance. Ils concernent aussi bien un emprunt bancaire, qu’un placement financier ou tout autre type d’opération générant des intérêts.
Concrètement, il s’agit de sommes d’argent déjà dues économiquement mais qui ne seront réglées qu’à une échéance ultérieure, souvent lors du prochain exercice comptable. Les ICNE reflètent donc une situation où les intérêts continuent de courir, sans avoir encore été encaissés ou payés, ce qui permet de donner une image fidèle de la tenue comptable et de l’ensemble des engagements financiers d’une entreprise.
Intérêts courus vs ICNE : quelles différences ?
Les notions d’intérêts courus et d’intérêts courus non échus (ICNE) sont proches, mais elles ne recouvrent pas exactement la même réalité.
- Les intérêts courus regroupent tous les intérêts accumulés sur une période donnée, qu’ils soient échus ou non échus ;
- Les intérêts courus échus désignent uniquement les intérêts accumulés dont la date de paiement est arrivée. Ils sont dus mais pas forcément encore réglés ;
- Les intérêts courus non échus (ICNE) correspondent exclusivement aux intérêts accumulés mais dont l’échéance n’est pas encore atteinte à la date de clôture. Ils figurent en charges ou en produits futurs selon qu’il s’agit d’intérêts à payer ou à percevoir.
À noter : les ICNE ne doivent pas être confondus avec des intérêts non courus payés par anticipation, qui relèvent d’une logique différente.
Pourquoi comptabiliser les intérêts courus ?
La comptabilisation des intérêts courus non échus (ICNE) joue un rôle central dans la qualité de l’information financière d’une entreprise. Elle n’est pas une simple formalité, mais une exigence indispensable pour les raisons suivantes :
- Assurer la transparence financière : enregistrer les ICNE permet de présenter une image fidèle de la situation économique de l’entreprise. Les intérêts étant pris en compte même si l’échéance n’est pas encore arrivée ;
- Respecter les obligations légales : en France, le Plan Comptable Général (PCG) impose d’intégrer les ICNE dans les écritures afin de garantir la régularité et la sincérité des comptes ;
- Faciliter la prise de décision : des comptes ajustés avec les intérêts courus non échus offrent aux dirigeants, investisseurs et partenaires financiers une base fiable pour évaluer la performance, anticiper les charges futures et mesurer leur impact sur le résultat net.
Comment calculer les intérêts courus non échus et échus ?
Les étapes du calcul
Le calcul des intérêts courus non échus (ICNE) repose sur une méthode simple, basée sur le temps écoulé entre le dernier règlement d’intérêts et la date de clôture de l’exercice comptable. Voici les étapes principales :
- Compter le nombre de jours séparant le dernier paiement et la date de clôture ;
- Déterminer le nombre total de jours dans la période concernée (par exemple, la durée totale de l’échéance prévue par le contrat) ;
- Identifier le montant total des intérêts dus pour cette période ;
- Appliquer la formule : Montant des intérêts courus = montant total des intérêts × (nombre de jours écoulés / nombre total de jours).
Ce calcul permet d’obtenir un montant précis à intégrer dans les écritures, afin que le document comptable reflète correctement les charges ou produits financiers au moment de la clôture.
Notre exemple
Imaginons qu’une entreprise contracte un emprunt le 15 mars N, avec une échéance fixée au 15 septembre N. Le montant des intérêts dus sur cette période de 180 jours (en prenant des mois de 30 jours pour simplifier) est de 7 200 €.
- Nombre de jours écoulés entre le dernier règlement et la clôture au 30 juin N : 105 jours ;
- Nombre de jours total de la période : 180 jours ;
- Montant des intérêts dus : 7 200 €.
Le calcul est donc : 7 200 × (105 / 180) = 4 200 €.
Ainsi, à la clôture du 30 juin, l’entreprise doit comptabiliser 4 200 € d’intérêts courus non échus, qui ne seront payés qu’à l’échéance de septembre.
Comment comptabiliser les intérêts courus ?
La comptabilisation des intérêts courus, qu’ils soient échus ou non, est indispensable pour présenter une vision juste de la situation économique d’une entreprise. Ils permettent de rattacher correctement les charges et produits financiers à l’exercice concerné.
Comptabilisation des intérêts courus et non échus en tant que charges (intérêts à payer)
Lorsque l’entreprise doit payer des intérêts sur ses emprunts, ces derniers doivent être enregistrés comme charges financières. À la clôture de l’exercice, l’écriture comptable consiste à :
- Débiter le compte 66116 « Intérêts des emprunts et dettes assimilées » pour le montant des ICNE,
- Créditer le compte 16884 « Intérêts courus sur emprunt ».
Cette méthode garantit que le compte d’exploitation reflète correctement les charges financières supportées, même si leur règlement interviendra plus tard.
Bon à savoir : Ces numéros de comptes sont définis par le Plan Comptable Général (PCG), qui fixe la nomenclature officielle.
Comptabilisation en tant que produits (intérêts à recevoir)
À l’inverse, lorsqu’une entreprise détient un placement générant des intérêts, ceux-ci doivent être enregistrés en produits financiers à la clôture :
- Débiter le compte 5188 « Intérêts à percevoir » ;
- Créditer le compte 768 « Autres produits financiers ».
Ainsi, les produits financiers sont rattachés à l’exercice de leur acquisition, ce qui permet une lecture fidèle et complète de la performance économique, au même titre que les autres éléments du compte de résultat.
Les enjeux pratiques et bonnes pratiques
L’importance des ICNE pour une image fidèle des comptes
Les ICNE jouent un rôle fondamental dans le respect du principe comptable d’image fidèle. Ils permettent de rattacher certaines charges fixes à l’exercice auquel elles se rapportent, même si elles ne sont pas encore échues. Cette pratique garantit que les états financiers reflètent avec exactitude la situation économique de l’entreprise à la date de clôture.
En France, le Plan Comptable Général impose que les comptes soient réguliers, sincères et donnent une image fidèle du patrimoine et du résultat de l’entreprise (article L.123-14 du Code de commerce, cliquez ici pour le consulter). Le traitement des ICNE répond à cette exigence en évitant les distorsions entre les flux financiers et leur enregistrement comptable.
Conséquences fiscales et financières
Sur le plan fiscal, les intérêts courus non échus ont un impact direct sur le résultat imposable. En enregistrant les intérêts courus, l’entreprise augmente ses charges financières, ce qui peut réduire son bénéfice imposable et influencer l’affectation du compte de résultat. Cette opération doit cependant être rigoureusement justifiée et conforme aux règles de rattachement des charges.
Une mauvaise gestion des ICNE peut entraîner :
- Des redressements fiscaux en cas de non-respect des règles de rattachement
- Une image faussée de la rentabilité ou de l’endettement
- Des écarts significatifs dans les prévisions budgétaires et les ratios financiers
La Cour des comptes souligne régulièrement l’importance d’une comptabilité rigoureuse pour éviter les distorsions fiscales et préserver la transparence financière.
Les erreurs fréquentes à éviter
Voici les principales erreurs à éviter dans le traitement des ICNE :
- Oubli d’enregistrement des ICNE à la clôture : beaucoup d’entreprises ignorent les intérêts non échus, ce qui aboutit à des comptes annuels ne reflétant pas tous les engagements ;
- Choix incorrect du compte comptable : Utiliser un mauvais numéro de compte peut entraîner une mauvaise classification des intérêts, ce qui fausse la lecture des charges ou des dettes dans les comptes ;
- Contre-passation incorrecte en N+1 : Une mauvaise annulation des ICNE peut entraîner des doublons ou des écarts injustifiés ;
- Manque de documentation : ne pas mentionner les méthodes dans l’annexe peut poser problème en termes de sincérité et de régularité ;
- Incohérence dans le choix de la base annuelle : Par exemple, appliquer une base de 360 jours au lieu de 365 ou ne pas respecter la convention prévue dans le contrat d’emprunt fausse le calcul des ICNE ;
- Confusion entre ICNE, intérêts capitalisés et anticipés : Ces notions ont des traitements comptables et fiscaux distincts.
Les bonnes pratiques
Voici les principales bonnes pratiques à adopter dans le traitement des ICNE :
- Toujours vérifier le contrat d’emprunt ou de placement pour connaître les échéances exactes et la convention de calcul utilisée (base 360/365, jours ouvrés, etc.) ;
- Penser à intégrer les ICNE dans les prévisions de trésorerie pour anticiper les paiements à venir liés aux intérêts, et éviter les tensions de liquidité ;
- Utiliser un outil comptable rigoureux ou un logiciel fiable pour automatiser les écritures d’inventaire (👋🏽 Indy) ;
- Inclure une ligne dédiée dans l’annexe des comptes annuels pour expliciter les montants d’ICNE, leur origine, leur impact.
Des interrogations au sujet des ICNE ? Nous vous répondons dans les commentaires !
